« Il y a un gros problème concernant les frais bancaires »

Les frais d’incidents de paiement à la suite de dépassement d’un découvert autorisé sont nombreux. Près de 10 millions de Français rencontrent cette situation tous les mois. Les frais commencent à 8 euros et peuvent atteindre 30 euros dans le cadre d’une procédure rapide, mais peuvent s’étendre encore plus. Jean Dupont, fondateur d’une startup, est à l’origine d’une alternative proposée à travers un coaching financier et des microcrédits.

Par Éva Pelletier


Pourquoi avez-vous choisi de lancer ce concept ?

Aujourd’hui en France, il y a un gros problème concernant les frais bancaires liés aux découverts qui représentent des montants astronomiques et qui viennent amputer le pouvoir d’achat des Français qui les subissent. On parle de plusieurs centaines d’euros par an, payés par prés de 20 M de Français. Les banques facturent chaque année environ 7 milliards d’euros de chiffre d’affaires liés à ces frais bancaires. Cela représente 20 à 25% du produit net bancaire.

Pouvez-vous expliquer précisément l’activité de votre startup ?

Nous avons développé une application web, sur laquelle l’utilisateur peut connecter son compte bancaire. Nous pouvons par la suite avoir accès à son solde et être capables de surveiller son évolution. Quand on voit que son solde et ses dépenses peuvent l’amener dans une situation de dépassement de découvert, on l’avertit. Par la suite, on lui propose une solution de financement alternatif au découvert, sous forme d’avance de trésorerie ou de microcrédit. Le coût de cette alternative est 10 à 20 fois inférieur à celui pratiqué par les banques.  

Vous développez une nouvelle application de la FinTech, avec une application pour mobile. Avez-vous rencontré des difficultés sur le plan technique ou légal  ?

Non, sur le plan technique il n’y a pas vraiment de difficultés. Nous travaillons avec un prestataire agréé qui permet de sécuriser la connexion. Sur le plan légal on agit dans le cadre de la DSP2 (la directive sur les paiements 2) qui donne justement droit aux utilisateurs des banques de choisir à qui ils veulent transmettre leurs données bancaires : cela leur permet de bénéficier de nouveaux services comme le nôtre par exemple.

Quand pensez-vous tester votre application avec de premiers clients  ?

Nous sommes actuellement sur la phase finale de tests, sur les différentes briques de l’application. Nous pourrons tester en live l’application auprès des clients d’ici quinze jours maximum. Nous avons déjà été accrédités auprès de l’ORIAS (Organisme pour le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance). Cette accréditation est rendue nécessaire par la loi pour pouvoir faire ce métier, car nous sommes intermédiaires en financement participatif, c’est-à-dire qu’on propose un produit d’investissement (microcrédit) aux particuliers.

Combien êtes-vous au sein de MoneeZen et quels sont les profils ? Êtes-vous issus d’une formation en finance  ?

Aujourd’hui nous sommes deux fondateurs, moi-même qui ait une formation généraliste, diplômé de Science politique et d’un DEA d’économie, j’ai travaillé dans le digital et dans le conseil Marketing. Quant à mon associé, Paul Durand-Lafoix, il est ingénieur en informatique et a travaillé sur les logiciels de finances de marché, notamment pendant 11 ans chez MUREX.

Pour un client, les m icrocrédits sont-ils cumulables et sont-ils illimités ?

Un utilisateur peut faire un microcrédit par mois, il ne peut avoir qu’un seul microcrédit en cours. À l’échéance de celui-ci, il le rembourse et il peut par la suite en faire un nouveau. C’est-à-dire qu’il peut enchaîner autant de microcrédit qu’il souhaite jusqu’au moment où il aura rétabli sa situation financière.

Sur quel s critère s vous basez-vous pour accepter de prêter de l’argent à un client  ?

Nous acceptons de faire un microcrédit à un client selon des critères d’évaluation du risque. Nous avons accès aux comptes de la personne, on établit alors un profil de risque et en fonction de notre analyse nous prêtons de l’argent que si l’on constate que cette personne est en capacité de rembourser le prêt.

Les usagers sont-ils sceptiques à l’idée de vous confier des données aussi sensibles ?

Je pense qu’il y a une certaine évolution des mentalités. Les usagers de plus de 40 ans ont un peu peur de donner accès à leurs comptes bancaires, alors que pour les gens plus jeunes c’est totalement normalisé, c’est quelque chose d’assez courant. Aujourd’hui, on le fait tous, que ce soit pour des applications, des cartes de fidélité, etc.. Ces données bancaires sont traitées dans le cadre du RGPD, on a donc un certain nombre de procédures et processus qui assurent à nos utilisateurs que ces données ne pourront subir aucune altération et ne seront pas communiquées à l’extérieur : on ne vend pas les données et on ne les communique à personne.

Pensez-vous chercher des investisseurs et si oui quand  ? Pouvez-vous préciser les différents types d’investisseurs ?

Oui en effet, nous avons déjà commencé la recherche d’investisseurs, mais nous allons rentrer dans une phase active de levée de fonds à partir de septembre. Lorsque je parle d’investisseur, je parle d’investisseurs en equity, dans l’entreprise MoneeZen. Nous avons deux sortes d’investisseurs, puisque nous cherchons aussi des prêteurs, ceux qui prêteront l’argent, utilisé pour les microcrédits des utilisateurs.

Comment les prêteurs seront-ils rémunér és ?

 Les microcrédits ne sont pas gratuits, ils ont un taux d’intérêt et ce dernier permettra de rémunérer le prêteur. Le taux d’intérêt chez MoneeZen est de 9%.

Prévoyez- vous de faire un partenariat avec des banques en ligne ou d’autres acteurs du métier  ?

Notre idée est d’éradiquer ces frais bancaires qu’on considère comme abusifs et exorbitants. S’il y en a qui sont intéressés par des partenariats pour proposer ce produit à leurs clients nous sommes évidemment ouverts à tout partenariat avec des banques. Mais je pense qu’il faudra une banque visionnaire, qui se rend compte que cette manière de gagner de l’argent aujourd’hui n’est plus dans l’air du temps et sera de moins en moins acceptée par les clients. Aujourd’hui, ça me paraît tout de même difficile, parce qu’une grande partie des bénéfices des banques viennent de ces frais bancaires.

Vous prévoyez d’être une uniquement en ligne ou d’ouvrir par la suite une agence où les clients p ourront venir vous rencontrer directement ?

Non, il n’y aura pas d’agence dans laquelle les clients pourront venir nous rencontrer physiquement. En revanche, nous réfléchissons à des modes de distributions physiques, notamment chez des courtiers en ligne et les courtiers lors de prêts immobiliers. On se rend compte que lorsqu’on demande un prêt immobilier, la banque étudie le dossier de l’emprunteur en détail, elle peut demander un certain nombre de documents et notamment les relevés bancaires des derniers mois. On se rend compte qu’aujourd’hui, une grande majorité des dossiers liés aux demandes de crédits immobiliers comportent des commissions d’interventions. Quand elle voit des commissions d’interventions, la banque s’interroge et cela peut l’amener à creuser plus, demander un historique bancaire un peu plus profond ou bien pénaliser le client en lui attribuant le crédit, mais avec un taux d’intérêt légèrement plus élevé. Quelques dixièmes de points de taux d’intérêt en plus sur un crédit immobilier de 20 ans peuvent se traduire en un surcoût de plusieurs milliers d’euros. Nous pensons que le produit proposé par notre plateforme peut être très intéressant pour les futurs acheteurs. Nous sommes en discussion avec des banques partenaires de notre incubateur, spécialisé dans les FinTech.